Chroniques du confinement – Muriel Augry : Demain sera lueur. Une île. En inconnu.

– I – Demain sera lueur Le printemps n’a plus de visage Les ombres se…

Le 12 mai 2020

– I –

Demain sera lueur

Le printemps n’a plus de visage

Les ombres se sont rétrécies

Furtives elles frôlent l’asphalte

Sans mot

Le temps a décidé de s’arrêter 

         Sans préavis

         Aux quatre coins cardinaux

Solennité de l’inaccoutumé

L’heure est à l’attente

Demain sera lueur

Le 28 mars 2020

– II-

Une île

Une île sans badauds ni troubadours

Une île vide de rumeurs, de rameurs

Une île couleur sepia, couleur d’hier, couleur de guerre

Senteurs aseptisées

Odeurs âpres, ivres de rien

Une île sans jour sans heure ni minute

Nuits croisées sur des jours trop longs

Monologues au vent au bout du vent

Vitres sans tain pour existence sans faim

Soupirs des fenêtres aux volets entr’ouverts

Aboiement d’un chien inconscient

Dans l’ornière asséchée

Hululement du vaisseau sirène

Sur l’asphalte complice

Une île au souffle intermittent

A l’œil fébrile

 Un phare balaie le néant sur l’île de ce printemps

Sans nom

               -III-

  En inconnu

Fier comme un drapeau il essaie d’attraper la lune

Ce printemps

A trois doigts du ciel

Nuit de mer légère et croustillante

A l’enveloppe outremer

            Insolente

Au balcon de l’hôtel Capsa l’air est saupoudré de gris

La ville se hausse sur les talons

En bas l’orchestre reste sans mot

L’ouvreuse a déposé son sac sur la rangée sans spectateur

Rideau tiré sur une scène malade

Meubles entassés

Comédien en deuil

La fièvre rôde

Les existences s’enroulent 

    en inconnu

Le 08 mai 2020