Le 1 mars 2022
Pour qui se prend Lori Saint Martin, ou comment s’inventer une nouvelle identité, celle dont on sent intuitivement qu’elle nous conduira sur le chemin de l’épanouissement ?
Forcément, le récit fait le pont entre le passé et le présent ; c’est un texte tout en circonvolutions sur la mémoire, l’enfance, le milieu familial, la mère.
Originaire d’une ville ouvrière de l’Ontario – donc anglophone – Lori Saint Martin sait intuitivement qu’elle n’est pas née au bon endroit, dans la bonne langue, et décide à dix ans que le français lui servira de passerelle vers un autre monde sublimé, vers un « elle-même » qu’elle rêve de créer minutieusement.
En devenant – au prix de milliers d’heures de travail, de lectures, de voyages et de rencontres – totalement francophone, la voici traductrice, interprète, autrice, professeure de littérature à l’UQAM, elle qui a trouvé dans un annuaire téléphonique le nom qui sera désormais le sien dans cette véritable métamorphose qui lui permet lentement de se réconcilier avec son milieu familial.
« Pour qui je me prends » raconte le voyage d’une femme qui, en devenant totalement francophone, a réussi à devenir celle qu’elle devait être. C’est le voyage d’une femme qui a sauvé sa peau en devenant francophone.
Lori Saint Martin raconte sa singularité d’être une transfuge de classe en étant « une translingue ».
« La langue est une mer, on baigne dedans. Moi, j’ai refusé. J’ai refusé ma langue maternelle, refusé la voix que j’avais en la parlant. J’ai adopté la langue française, comme on dit adopter un enfant, mais pour en devenir la ville et pour me redonner naissance…
Le français, ma langue d’amour, ma langue d’écriture… »
« Une passeuse de langues, une ignoreuse de frontières, une tisseuse de mots. Voilà pour qui je me prends. Voilà qui je suis. »
« Pour qui je me prends » de Lori Saint-Martin, paru au éditions Boréal
Rédigé par Danielle Michel-Chich